Cet article est paru dans Les Cahiers de Gestalt-thérapie 2020/1(n°43), 82-89
Béja, V. & Belasco, F. (2020). L’attente secrète : Une boussole relationnelle dans une perspective de champ. Cahiers de Gestalt-thérapie, 1(1), 82-99. https://doi.org/10.3917/cges.043.0082
Se situant dans la perspective d’une Gestalt-thérapie relationnelle et de champ, les auteurs viennent éclairer la phénoménologie de l’intervention clinique en montrant que l’activité principale du thérapeute consiste en un travail d’ajustement autour de sa propre résonance au mouvement de contact qui organise la rencontre thérapeutique elle-même. Le thérapeute se « dispose » pour mieux « entendre ».
Et c’est ce changement chez le thérapeute qui prépare le changement du patient.
Une vignette clinique vient en illustrer les différents moments. En désignant l’intentionnalité à l’œuvre dans la rencontre comme « attente secrète » les auteurs introduisent une notion neuve, offrant ainsi aux praticiens une boussole sensible qui leur permet de s’orienter et de tenir dans leur effort pour s’ajuster au patient et maintenir leur visée de le rejoindre.
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Soucieux de l’effectivité des thérapies que nous menons, nous avons
voulu examiner comment notre visée de changement et notre posture d’écoute pouvaient s’articuler tant au plan théorique que pratique.
Car oui, la psychothérapie gestaltiste a bien une visée : œuvrer pour que le regard du patient sur le monde change, pour que les rapports entretenus avec l’environnement évoluent de sorte que l’expérience du patient soit moins souffrante.
Et pourtant, inspirée par l’attitude phénoménologique faite d’observation, d’écoute et d’accueil, la pratique de la Gestalt-thérapie ne vise pas directement le changement. Elle nous apprend à traverser des temps de non-sens, des situations floues ou inconfortables.
L’acceptation de ce qui se passe, l’attente patiente qu’émerge une figure, le souci de ne pas imposer de différenciation prématurée sont la marque d’une posture respectueuse de l’expérience de l’autre. Mais une telle disposition à l’écoute, à l’accueil et à l’attente peut aussi paralyser le thérapeute, s’il est confluent avec elle et finir par engager la dynamique relationnelle de la dyade thérapeutique dans une boucle sans fin.
C’est à la formulation et à l’exploration de ce lieu où doivent s’agencer ensemble visée de changement et posture d’écoute phénoménologique que nous souhaitons contribuer à travers cet article. Cette articulation peut-elle être cohérente avec la Gestalt-thérapie ? Nous le pensons et avançons la notion d’attente secrète que nous construisons comme une boussole qui puisse nous orienter dans les zones d’incertitude et d’errance que, dans toute thérapie, nous sommes inévitable- ment amenés à traverser.